Alors qu’un ciel bleu règne sur Toulouse la Rose, Paris devient blanche.
De lourds flocons s’abattent régulièrement sur le pavé depuis quelques jours déjà. Mais au début, la neige n’existait pour de vrai que pour la couronne extérieure.
Pour les Parisiens ce n’était qu’une brume blanche un peu épaisse. Un sujet d’anxiété pour ceux qui devaient prendre le périph’ le soir. Les vrais parisiens, eux, la neige ça ne les regardaient pas. Et d’ailleurs pour la voir, il fallait vraiment s’accrocher, scruter la fenêtre avec attention. La neige c'était pour les indolents, les innocupés, ceux qui n'avaient rien de mieux à faire....
Mais aujourd’hui les flocons se sont fait plus épais, plus imposant. Inévitables.
Et tout d'un coup
images prises par des lecteurs du Monde
Et les Parisiens n’ont plus pu l’éviter. Elle était là, à nos fenêtres, tombant avec régularité, sans relâche. Inéluctablement.
Je ne sais pas pourquoi, mais avec la neige,
la vraie grosse neige,
le temps ralentit.
Avez-vous remarqué déjà combien la neige tombe avec douceur ? La pluie s’abat sur le pavé avec une netteté cinglante, elle semble vouloir percer nos habits. Au contraire, il y a une sorte d’hésitation dans les flocons.
Une sorte d’excuse lorsqu’ils viennent finalement se poser sur le toit d’une voiture.
Et puis les Parisiens, si pressés, si importants d’ordinaire semblent reconquérir un peu de temps.
C’est très amusant d’ailleurs. Il y aura toujours ceux qui sont au dessus de la neige.
Ceux que rien ne peut ébranler de leur rythme. Vite vite des appels à passer, des contrats à signer, plus vite un projet à valider, vite le temps ne va pas s’arrêter, non l’aéroport n’a pas le droit de fermer, trouvez moi une solution s’il vous plait, vite vite des appels à passer.
Et puis il y a les autres, qui en dessous de leur costume Armani gardent un souvenir d’enfance.
Il y a nous, qui depuis notre premier étage boulevard Haussmann regardions la neige prendre possession de la rue. Un moment de pause au milieu de nos journées si chargées. Quelques silhouettes, un directeur monde, une apprentie, une assistante à la fenêtre. Silencieux devant la beauté des flocons. Hypnotisés par le manège de leurs virevoltes dans les bourrasques de vent. Côtes à côtes, tranquilles. Absorbés par la quiétude de la rue.
Et pourquoi se presser de rentrer vu que de toutes les manières tout est bouché ? Prendre le temps de bien finir son travail, et puis enfin rentrer.
Mais sans se presser.
Au milieu de ces passants qui courent, qui se pressent, qui se tortillent juchés sur leurs talons pour rejoindre au plus vite les profondeurs du métro, il y a nous ....
paisibles dans la rue.
Qui prenons le temps de poser nos pieds, hésitant à chaque pas : marcher dans la grisaille pour protéger les pans de neige encore blancs ? Ou bien avoir le plaisir de sentir crisser sous nos semelles la neige en y laissant nos traces ?
Qui nous échangeons des regards complices, qui rions mutuellement de nos sourires ravis, précautionneux de ne pas perdre l’équilibre.
Qui ramassons furtivement la neige le long des voitures pour en sentir la texture. Qui en faisons une boule de neige en regrettant de ne pas avoir l’audace de la lancer sur le beau passant qui nous dépasse.
Pour voir s’il a un peu d’humour,
s’il a lui aussi encore un peu une âme d’enfant.
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